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哲学相关阿兰巴迪欧的誓愿

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V?UX PUBLICS D’ALAIN BADIOU

(Aubervilliers, théatre de la Commune, 11 janvier 2016)

Avant de présenter mes v?ux à un public aussi vaste, largement composé de gens que je ne connais pas, je me suis soudain rendu compte que je m’exposais à de considérables risques. Notre premier ministre, l’énergique Manuel Valls, a très justement proclamé un axiome politique qui, je le crois, marque un heureux tournant dans nos valeurs bien fran?aises et totalement républicaines. Il a dit en effet : ? l’essence de la liberté, c’est la sécurité ?. Notez bien, il n’a pas dit ? l’essence ?, qui pour lui désigne très justement du pétrole raf?né. Mais je résume sa pensée concrète dans une phrase abstraite. Cette magni?que sentence de Valls nous dit qu’il faut concevoir la liberté républicaine dans le juste appareil d’une protection par la ?nitude. La sécurité, en effet, qui concerne l’individu et ses propriétés, qui porte donc sur un domaine essentiellement ?ni, doit être absolue. Sinon, nous sommes immédiatement exposés à quoi ? Eh bien, à l’in?nité insinuante et angoissante des risques. Or l’homme républicain libre et

occidental a le droit, le droit absolu, de ne courir aucun risque. L’Etat est d’abord et avant tout une assurance tous risques. Et ce droit, il revient à la police républicaine de le garantir à chaque citoyen, et naturellement, dans notre République moderne, également à chaque citoyenne. Si bien que nous devons oser une formule qui parait en effet osée, mais qui découle absolument de la formule de notre premier ministre. Oui, l’essence de la liberté, c’est la sécurité, et donc, la philosophie républicaine de la ?nitude sécuritaire nous impose de dire : l’essence de la liberté, c’est la police. Et par conséquent, l’urgence quand apparait le moindre risque, c’est d’appeler urgemment à un renforcement in?ni de la protection policière de notre ?nitude. La formule -- protéger notre ?nitude individuelle par l’in?nité policière -- peut para?tre exagérément

dialectique. Mais elle est heureusement dépourvue de tout risque. L’in?nité policière de l’Etat d’urgence est en effet exclusivement destinée à protéger tous les citoyens de l’in?ni lui-même. Comme le montrent les très belles formules qui dé?nissent les actions particulièrement ?nies de l’in?nité policière. Citons parmi ces belles formules, l’incarcération préventive, la restriction du droit d’aller et de venir, l’assignation à résidence, la privation de la nationalité, l’élargissement du droit de la police à tirer sur tout ce qui bouge, le droit de perquisition illimité jour et nuit et le droit d’écouter les conversations téléphoniques de n’importe qui à n’importe quel moment, tout comme celui de lire les messages électroniques de n’importe qui dans n’importe quelle

direction. Toutes ces procédures, rigoureuses mais indispensables, visent à mettre dans une ombre carcérale extrêmement ?nie quiconque peut être soup?onné de tendances in?nies, et ainsi de le rééduquer par les méthodes les plus républicaines. En particulier, on éradiquera en lui la tendance effrayante à croire qu’il y a quelque chose de plus que le monde tel qu’il est. Tendance très justement nommée ? radicalisation ?, ce qui veut dire : avoir une pensée

radicale. Et ? radicale ?, cela veut dire : qui pense les choses jusque dans leurs racines. Voilà le péril de l’in?ni : la racine ! Les choses que nous connaissons auraient-elles d’invisibles racines qu’il faut penser avec force, et éventuellement extirper ? Cette vision des choses est non seulement ridicule, mais dangereuse. Les méthodes ?nies de l’in?nité policière visent à dé-radicaliser tout ce qui bouge, et à arracher toutes les racines de la pensée radicale. Arracher les racines de la pensée enracinée est la racine même de la déradicalisation. Sur ce but suprême, il faut être intransigeant et constamment vigilant.

Un point symbolique de cette vigilance a été du reste af?rmé, bien avant les récents attentats, par celui qui est devenu, sous la protection paternelle du président Hollande notre actuel chef de gouvernement après avoir été notre chef de la police, celui que j’ai nommé en commen?ant ce préambule à mes v?ux, l’in?exible Manuel Valls. Dès ses débuts, et sans hésiter, il a

dispersé, incarcéré, persécuté, ceux qui, sous le nom par lui-même louche de ? Roms ?, sont des nomades de provenance incertaine qui sévissent de fa?on anormale sur notre territoire ?ni.

Qu’est-ce en effet qu’un nomade, je vous le demande ? C’est quelqu’un qui semble préférer l’in?nité des voyages, l’incertitude du nomadisme, l’insécurité des campements en plein air à un logement clos dont l’heureux habitant républicain et citoyen nourrit le juste désir de devenir le propriétaire exclusif. Et quand il le deviendra, il sera prêt à défendre sa sécurité, c’est à dire la cl?ture de sa propriété, avec un fusil et un chien policier. Contre ce beau et libre désir, l’errance in?nie du Roms, qui menace la ?nitude du propriétaire, n’est pas républicaine, a dit alors très fermement et raisonnablement Valls, chef de la police, et donc chef de la sécurité, ce qui veut dire, la formule est audacieuse mais juste : chef de la liberté. Il a dit, le chef de la liberté : Ces gens veulent de l’in?ni, ils veulent du risque ? Ils vont en avoir. Et il a envoyé la police disperser et dévaster leurs campements sauvages et entamer leur rééducation républicaine par la belle ?nitude des contraventions, des expulsions et des incarcérations.

Ceci du reste se disposait dans une pensée plus vaste, qui est la suspicion républicaine à l’égard de quiconque n’est pas un fran?ais incontestable, doté de parents fran?ais. Et aussi, si possible, d’arrière-grands-parents fran?ais, c’est encore mieux. Pour ne rien dire de l’excellence qu’il y a à ce que vos arrières-arrières grands parents soit eux-mêmes fran?ais, et ce du c?té de vos deux parents fran?ais. Là, votre ?nitude identitaire fait plaisir à voir. L’étranger, c’est le contraire. Tout étranger en effet, n’étant pas d’ici, est d’ailleurs. Or ailleurs, c’est grand. C’est même très grand. C’est peut-être in?ni, ? ailleurs ?. Et l’in?ni est bourré de terroristes, c’est évident. Donc, ceux qui n’ont pas leurs arrière-grands-parents tous fran?ais, dans les deux directions parentales, il faut, au minimum, les avoir à l’?il et user les concernant de la

perquisition jour et nuit comme du contr?le incessant dans la rue. Notre liberté, dont je vous rappelle que le chef est le chef de la police, l’exige. Au maximum, s’ils continuent obstinément à aller souvent ailleurs, notamment dans les régions du monde où sévissent les complétement radicalisés de la radicalisation, il faut les rééduquer par une ?nitude sévère, déraciner leur go?t pour les idées qui vont à la racine des choses, et si ?a ne marche pas, les renvoyer. Les renvoyer où ? En tout cas, ailleurs.

Alors, vu tout ?a, je me suis dit, en me parlant à moi-même familièrement, d’individu ?ni à

individu ?ni : ? mon vieux, en présentant tes v?ux à ton séminaire, comme ?a, à des gens que tu ne connais pas tous, tu cours des risques. Donc tu n’es pas en sécurité. Donc tu n’es pas libre ?.

En vous regardant, là, tous, devant moi, je me dis : il y a peut-être là des gens qui viennent

d’ailleurs. Et même, des gens venus de plusieurs pays différents, ce qui veut dire qu’ils viennent de plusieurs ailleurs différents. ?a, c’est de l’in?ni multiplié, un risque énorme ! L’entrée est libre, dans ce théatre de la Commune. Libre, c’est-à-dire risquée, c’est-à-dire insécure, c’est-à-dire pas libre. C’est dialectique en apparence ?a, pas libre parce que c’est libre. Mais je l’ai déjà dit : c’est le prix à payer pour que le chef de la police soit content. Songez que même un Roms pourrait s’asseoir tranquillement là, dans la salle. Vous n’allez pas me dire que ?a ne menace pas notre ?nitude républicaine, un truc pareil.

Et d’ailleurs, ce théatre, il a un nom un peu suspect. Parce que la Commune de Paris, entre nous, c’était de la rêverie in?nie. C’était quasiment de vrais communistes, les gens de la Commune de Paris. Ils étaient in?nis à fond ! A mon avis, ils étaient tous, je dis bien tous,

complètement radicalisés. Et rien à faire pour les dé-radicaliser ! Même une thérapie de groupe musclée accompagnée de puissants neuroleptiques ne pouvait y parvenir. Il a fallu tous les tuer, c’est vous dire. Vingt-trois mille fusillés dans les rues de Paris pour sauver in extremis la sécurité des propriétaires, et donc la liberté. C’est triste, mais c’est nécessaire. Et qui les a

fusillés ? Ceux qui ont fondé notre république, ceux qui c’est qu’ils ont des rues et des avenues partout en France : Auguste Thiers, Jules Ferry, Jules Simon, Jules Grévy, Jules Favre…Ils ont fait un boulot terrible, ces fondateurs de la République. Triste, mais juste. Fusiller l’in?ni est

souvent une nécessité pour l’Etat, pour sa police, pour la sécurité et donc pour notre liberté républicaine.

Alors, vous imaginez ! Dans le théatre de la Commune, un théatre hanté par l’in?ni, je dois me protéger ? un max ?, comme on dit dans notre pays libre, festif, joyeux, républicain, sécure… Il faut que j’applique le principe de précaution, le principe de la sécurité maximale, donc de la liberté la plus ?nie, donc la plus grande. Il faut que je contr?le mes v?ux, qu’au contact de tout l’ailleurs qu’il y a ici, ils ne deviennent pas in?nis. Parce qu’alors, ma ?nitude dispara?tra dans l’in?ni, et ce sera, ici même, à Aubervilliers, la Commune de Paris. Et alors, mes amis, on y

passera tous. Parce que le spectre de Jules Ferry, fondateur de la République, de l’école la?que et du colonialisme, veille sur tout ce qui est enseignement public. Il a dit, Jules Ferry, je le cite exactement, c’est tiré d’un discours du vénéré fondateur de notre école républicaine, la?que, et pleine à ras bords de sécurité, écoutez bien : Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu'en effet les races supérieures ont un droit vis à vis des races inférieures, parce qu'il y a un devoir pour elles. Elles ont un devoir de civiliser les races inférieures [...]

Vous avez bien entendu ! Les inférieurs sont ailleurs, il faut leur apprendre ce que nous

sommes, ici. Civilisés, nous sommes ! Encore récemment, suite à des massacres de masse nihilistes et horribles, notre président a dit qu’il y avait une guerre mondiale entre les barbares et les civilisés. Hollande et Jules Ferry, même combat, civilisé, policier, la?que et sécuritaire ! Même en présentant mes v?ux, je ne dois pas oublier, vu qu’il y a peut-être ici des gens d’ailleurs, les devoirs de la civilisation, les valeurs fran?aises. Je suis coincé, ici, entre le nom de ce théatre, le nom in?ni ? La Commune ?, et le spectre de Jules Ferry, qui a enseigné aux communards et aux colonisés la ?nitude civilisée. Il faut, en vous présentant mes v?ux, que je me fau?le entre ces deux termes contraires : ? Commune de Paris ? et ? Jules Ferry ?, ou encore ? in?ni ? et ? ?ni ?.

C’est là que je vais utiliser largement des formules de Christian Duteil, journaliste et philosophe, critique et humoriste, qui sait parler comme il convient de ceux qui nous gouvernent, comme de nos rites sociaux.

Voici donc la version précautionneuse de mes v?ux laquelle est en conformité avec le principe de précaution inscrit dans la Constitution, et avec tous les impératifs de la sécurité sociale, ce qui veut dire : bien dans l’abri des lois, de la justice, de la police, et donc libre comme l’air. Je vous prie tous, là devant moi, d'accepter mes v?ux à l'occasion du solstice d'hiver et du premier de l'an sans aucune obligation implicite ou explicite de votre part, surtout si vous êtes fran?ais à la troisième génération, mais sans exclure les autres, sans non plus exactement les inclure, du moins sans examen préalable. Mes v?ux seront en adéquation avec la tradition, la religion ou les valeurs existentielles de votre choix, dans le respect de la tradition, de la religion ou des valeurs existentielles des autres, ou dans le respect de leur refus, en la circonstance, de traditions, religions ou valeurs existentielles, ou de leur droit de manifester leur indifférence aux fêtes populaires programmées, en sorte qu’au bout du compte, mes v?ux soient

indubitablement la?ques, c’est-à-dire marqués par une indifférence totale à toute conviction sinon la forte conviction la?que elle-même, à savoir qu’avoir une conviction ou une Idée, quelle qu’elle soit, expose en général à l’in?ni, donc à des risques, et n’est donc pas conforme à notre conception républicaine pleine d’une festive ?nitude. Juste après l’impératif républicain de l’essence de la liberté en tant que suprématie de la police, vient en effet le sage conseil philosophique de notre société : vis sans Idée ! Ceci dit, pour ne prendre aucun risque, je

présente aussi mes v?ux à ceux qui ont une Idée, tout en leur faisant savoir, en toute fraternité républicaine, que je n’en ai aucune. Et en particulier, je n’ai aucune idée contraire à l’idée qu’ils ont, sinon justement l’idée de n’avoir aucune idée, laquelle n’est pas une idée, mais une opinion que je ne veux imposer à personne, même si je me l’impose à moi-même.

Bien entendu, mes v?ux concernent votre santé. Mais ceci ne suppose de ma part aucune connaissance particulière de votre dossier médical, ni une quelconque volonté de m'immiscer dans le dialogue con?dentiel établi avec votre médecin traitant. De même, je ne prétends nullement m’insinuer entre vous et votre assureur, notamment dans le cas où vous seriez en train de discuter avec lui une convention visant à couvrir les frais de vos obsèques.

Mes v?ux concernent aussi votre prospérité. Mais bien entendu, j’ignore tout de la somme ?gurant sur votre déclaration de revenus, de votre taux d'imposition et du montant des taxes et cotisations auxquelles vous êtes assujetti.

Mes v?ux concernent en?n votre bonheur. Mais l'appréciation de cette valeur est laissée à votre libre arbitre et il n'est pas dans mon intention de vous recommander tel ou tel type de bonheur. J’ai sans doute écrit un livre qui s’appelle ? Métaphysique du bonheur réel ?, mais vous n’avez à mes yeux nulle obligation de le conna?tre, encore moins de le lire, et encore

moins d’en tirer quelque idée qui mettrait en danger vos opinions ordinaires, et vous exposerait peut-être, pour couper vers le pire, à un risque de radicalisation.

Je tiens à faire ici les prudentes remarques suivantes, concernant le calendrier, toutes tirées du très remarquable texte de v?ux de Christian Duteil, que je soutiens sur tous ses points sans cependant forcer quiconque à le soutenir, ni du reste à ne pas le soutenir.

1. Le concept d'année nouvelle est ici basé, pour des raisons de commodité, sur le calendrier grégorien, qui est celui le plus couramment utilisé dans la vie quotidienne du pays, à savoir la France, à partir de laquelle ces v?ux vous sont adressés. Son emploi n'implique aucun désir de prosélytisme, car je pense que ceux qui sont ici sont ici, que ceux qui sont ailleurs sont ailleurs, et que chacun doit, restant chez lui, observer ses coutumes. Je pense même qu’il est légitime que chacun, vu le principe de sécurité et de ?nitude, pense que ses coutumes sont bonnes puisque ce sont les siennes. La légitimité des autres chronologies utilisées par d'autres cultures n'est donc absolument pas mise en cause par moi, pour autant qu’elles restent chez elles, pour que les vaches de chaque pays et de chaque culture soient mieux gardées. En particulier, la chronologie de la naissance des veaux doit rester, comme les vaches bien élevées, le propre des pays et des populations dans lesquelles ils naissent, les veaux.

Rappelons-nous du reste, quand il s’agit de défendre les valeurs bien fran?aises, de ce qu’a un jour déclaré le grand de Gaulle : ? les fran?ais sont des veaux ?.Tirons de ce point de principe quelques conséquences prudentes.

- le fait de ne pas dater ces v?ux du yawm as-sabt 1 Safar de l'an 1434 de l'Hégire (fuite du Prophète à Médine) ne constitue ni une manifestation d'islamophobie, ni une prise de position dans le con?it isra?lo-palestinien;

- le fait de ne pas dater ces v?ux du 2 Teveth 5773, ne constitue ni un refus du droit d'Isra?l à vivre dans des frontières s?res et reconnues, ni le délit de contestation de crime contre l'humanité;

- le fait de ne pas dater ces v?ux du 3ème jour (du Chien de Métal) du 11ème mois (Daxue, Grande Neige) de l'année du Dragon d'Eau, 78ème cycle, n'implique aucune prise de position négative, ni ne manifeste une crainte, au regard de la montée en puissance du capitalisme chinois. Il n’implique pas non plus une panique au regard de la crise boursière à Shanga?.

- le fait de ne pas dater ces v?ux du Quintidi de la 3ème décade de Frimaire de l'an 221 de la République Fran?aise, une et indivisible, ne saurait être assimilé à une contestation de la forme

républicaine des institutions et plus généralement ne saurait conduire à quelque doute que ce soit concernant les valeurs fran?aises de liberté en tant que sécurité, gaieté, galanterie, la?cité, esprit critique, tolérance au blasphème, hostilité aux foulards et aux jupes longues, confortable propriété pour les ouikindes, bonnes bouffes entre amis et voyage sympa dans les ?les Hébrides comme à Marrakech.

Tout ceci étant dit et garanti, je peux vous adresser mes riches v?ux, certes internes au principe de précaution, mais démocratiques et libres, m’exprimant tout entier dans toute leur libre originalité, leur sincérité individuelle, leur écho confortable. Ecoutez bien :

Bonne Annee

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V?UXPUBLICSD’ALAINBADIOU(Aubervilliers,théatredelaCommune,11janvier2016)Avantdeprésentermesv?uxàunpublicaussivaste,largementcomposédegensquejeneconnaispas
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